Marina Diaby

À PROPOS DE SON FILM La fin du dragon (2015, 27’ – 10:15)

Je suis autodidacte et j’ai découvert la mise en scène en travaillant comme assistante et en faisant du casting. J’ai écrit il y a quatre ans mon premier court métrage, Chacun sa nuit, qui a été produit par Mezzanine Films avec le soutien de la région Aquitaine.

Je cherchais après ce film à évoquer une question grave mais sur le mode de la comédie, en inventant un univers qui me permettait de l’aborder de manière décalée, ce qui m’a conduit à écrire cette histoire de fratrie qui se retrouve autour d’une mère dans le coma et qui doit être débranchée à la fin d’un protocole thérapeutique.

Je suis lectrice dans des commissions et je vois passer beaucoup de dossiers et de producteur·rices qui les accompagnent, mais peu correspondaient à mon projet. Je suis allée voir Sébastien Haguenauer qui est producteur chez 10:15. Il avait vu Chacun sa nuit et il avait envie que l’on travaille ensemble. Je n’avais encore rien é­crit et je lui ai simplement dit : « Je voudrais écrire une comédie sur une fratrie qui débranche leur mère. » et il m’a répondu : « Super ! On y va. ». Ensuite, on a écrit le scénario ensemble. C’était un très gros travail d’écriture, parce qu’il fallait trouver le ton. Je suis une maniaque du scénario. Pour moi, un film c’est d’abord le travail de scénario, les acteur·rices font le reste.

À part une aide à l’écriture que j’ai obtenue de la Région Limousin, où j’ai grandi, c’est la production qui a trouvé les financements et qui s’est occupée de tout, ce qui est tout de même très confortable pour le/la réalisateur·rice. Nous avons échoué à la Contribution financière, où le projet n’est pas remonté en plénière. C’est le jeu des commissions et il faut faire avec. Par contre, nous avons obtenu une aide à la production de 30 000 € environ de la Région Limousin et une aide de l’Adami qui prenait en charge les salaires des acteur·rices au tarif syndical. La Ville de Paris (Paris Mission Cinéma) nous a aussi soutenu à hauteur de 20 000 € et le producteur a investi 50 000 €. Je pense que le budget total du film est d’environ 120 000 €.

La préparation a duré un mois et demi. On a eu un souci avec l’actrice principale qui nous a lâché·es dix jours avant le tournage pour partir sur autre chose. C’était horrible car j’étais allée faire des repérages en Limousin et nous n’avions plus le premier rôle ! La production a mis deux directrices de casting sur le coup et on a trouvé Emilie Caen. Ce qui était difficile, c’était de constituer une fratrie, il fallait vraiment que ça marche bien entre les acteur·rices.

Le tournage s’est fait en huit jours, en février 2014, avec pas mal de problèmes de planning car la comédienne avait un autre tournage en cours. Les journées étaient très longues. Le film est tourné en huis clos et nous étions hébergé·es au même endroit. On a tourné aussi un peu à Paris. Le chef opérateur était déjà premier assistant caméra sur mon précédent court métrage.

Pour la musique, je voulais absolument utiliser une chanson de Jacques Brel, La ville s’endormait, que j’avais découverte en écrivant le scénario. Brel a beaucoup chanté la mort, mais sur un mode assez grinçant. La ville s’endormait est une chanson crépusculaire, Brel savait qu’il était condamné, mais il en parle avec une grande sobriété, comme une sorte d’acceptation. La production a contacté les ayant-droits, la fille de Brel a donné son accord et le tarif a été adapté au budget d’un court métrage.

Il y a aussi un plan dans le film qui le fait basculer de la comédie au drame. C’est un morceau court, mais il fallait très bien le penser et le compositeur, Amaury Chabauty, a fait un beau travail, tout cela dans l’urgence de l’avant Cannes. Mais il a été très efficace, comme toute l’équipe de post-production.

La Semaine de la critique à Cannes était notre premier festival et on ne pouvait rêver mieux. Nous leur avions envoyé un lien Viméo alors que le film n’était ni étalonné, ni mixé, mais les sélectionneur·ses ont eu un coup de cœur. La sélection a donné une grande visibilité au film qui a été inscrit depuis dans une vingtaine d’autres festivals, en France et à l’international. Il a été projeté à la Cinémathèque à l’occasion de la reprise de la Semaine de la critique et les chaînes veulent le voir.

Je commence l’écriture d’un long métrage. Ce sera une sorte de road movie familial. La famille est un terrain qui m’intéresse beaucoup, avec toute sa complexité et ses névroses.


Témoignage publié dans le Guide des Aides 2015.