Claire Scopsi

Maitre de conférences et Responsable de la licence professionnelle ressources documentaires et bases de données, spécialité Métiers de la documentation audiovisuelle (INTD/CNAM)

L’équipe pédagogique Intd/CNAM a accueilli en 2015 sa 18ème promotion d’élèves spécialisé·es dans le traitement des documents audiovisuels. Ce diplôme, créé en 1997, est devenu une licence professionnelle en 2001. Sa vocation répond à celle du Conservatoire National des Arts et Métiers : « la formation tout au long de la vie », ce qui veut dire qu’elle est destinée aux adultes âgé·es de plus de 28 ans ayant déjà une expérience professionnelle et souhaitant élargir et compléter leurs compétences. Je préfère parler de prolongation de parcours professionnel que de reconversion car la documentation audiovisuelle se marie bien avec une expérience ou une formation antérieure dans le secteur (montage, cadrage, prise de son…), la photographie, le patrimoine et la lecture (histoire, musées, archives, bibliothèque…), la musique, les arts graphiques, la vente de produits culturels – libraires, disquaires…) ou la communication.

Les métiers de la documentation audiovisuelle se reconfigurent. Le secteur de l’audiovisuel public et privé est atone, la presse et l’édition cherchent leur nouvelle place face au monde numérique et le secteur culturel souffre de la crise. Il est donc illusoire d’espérer insérer une promotion entière d’iconographes ou de recherchistes, mais il existe d’autres débouchés. En effet cette situation de crise est compensée par le dynamisme de l’image numérique qui ne permet plus de concevoir un site, quelque soit son objet, sans images, sons et vidéos et par l’intérêt actuel pour la préservation et la valorisation des patrimoines immatériels et culturels. Actuellement, et ce sera sans doute le cas à l’avenir, la documentation audiovisuelle n’existe pas en tant que métier unique mais comme un ensemble de tâches requises par des missions diverses (l’accès au savoir et à la culture pour tous, la publicité, l’information…) et reposant sur un tronc commun de compétences et de savoir-faire. Il y a donc DES métiers de la documentation audiovisuelle, qui se déclinent selon des objectifs variés :

– La conservation et la valorisation des fonds anciens, qu’ils appartiennent au patrimoine public ou aux entreprises. Le secteur du luxe, à l’instar de la maison Chanel, a bien compris l’importance de ses archives pour garder vivant ce qui fait la personnalité d’une marque. Cela se traduit par des films, des expositions, des ouvrages. L’exemple de Chanel est d’ailleurs suivi par d’autres grandes maisons au point que le « cinéma » de haute couture est un phénomène étudié par les chercheur·ses ! Les archives audiovisuelles privées, les films d’amateur·es ou les films de famille, témoins des évolutions de la société, sont eux aussi préservés et présentés, surtout lorsqu’ils rejoignent « la grande histoire ». La cinémathèque de Bretagne présente ainsi une collection de plus de mille films amateurs numérisés consacrés à la mémoire du travail.

– Les services d’archives municipaux ou départementaux reçoivent des documents sur tous supports et sont confrontés aux questions de la conservation préventive et de la numérisation des fonds versés. Ils commencent, comme les archives départementales de la Seine Saint-Denis, à mettre leurs collections iconographiques en ligne. De leur côté, les services de communication des collectivités territoriales gèrent une chaine complète de production et d’exploitation de films ou de reportages photos pour leurs web tv, leurs sites ou leurs publications papier, dont les droits de diffusion doivent être impeccablement identifiés.

– La recherche n’est pas en reste : les corpus d’iconographie scientifique sont collectés et sauvegardés et l’image scientifique participe à la communication des instituts (l’IFREMER ou le CIRAD sont par exemple présents sur YouTube) ; quant à l’enseignement supérieur, il est actuellement en train de constituer une formidable collection de vidéos pédagogiques pour alimenter les MOOC (« Massive Open Online Course » ou « Cours en ligne massivement ouverts »).

– La reconnaissance du patrimoine immatériel par l’UNESCO a conduit à une multiplication des collectes de témoignages filmés ou enregistrés. L’histoire contemporaine, la préservation des cultures populaires ne peut plus se passer de ces campagnes de recueils, qui demandent des savoir-faire technique et juridique adaptés.

Ainsi les bibliothécaires, photothécaires, vidéothécaires, archivistes, médiateurs culturels, assistants de marketing ou de communication, webmaster éditoriaux ou gestionnaires de Mooc, sont un jour ou l’autre confronté·es à l’image fixe, au son, à l’image animée et assez souvent aux trois à la fois.

Pour répondre à ces besoins, nos diplômé·es proposent une expérience souvent longue dans l’image et le son qui a façonné non seulement leur culture des contenus, des auteur·rices et des artistes, mais aussi leur « œil » ou leur « oreille », leur capacité à sélectionner le « bon son », la « bonne image » en fonction de sa qualité technique ou sémiologique. La formation insistera sur la connaissance des acteur·rices du secteur de la conservation et de la valorisation des fonds audiovisuels, et sur les méthodes qu’ils/elles pourront adapter à leurs futurs secteurs d’activité. A l’issue de l’année de formation les élèves savent, en toute autonomie : analyser et inventorier un fonds et définir les priorités d’un plan de numérisation ; respecter les normes de traitement des métadonnées descriptives et documentaires en vigueur dans la photographie, la vidéo, les archives, les cinémathèques, les bibliothèques…) ; gérer les droits liés à la prise de vue et l’exploitation des œuvres ; utiliser et paramétrer des logiciels documentaires de gestion d’image, organiser et gérer des fonds à l’aide de logiciels libres ; mettre en œuvre et alimenter des sites web dynamiques ; réfléchir au positionnement marketing d’un fonds et concevoir des services associés ; participer à des projets d’expositions, de parcours muséaux et documentaires en proposant des sélections d’images et en négociant les droits dans la cadre d’un budget imposé.

Les cours sont assurés à 75% par des professionnel·les en activité : documentalistes et archivistes audiovisuel, juristes, photothécaires, photographes ou historien·nes de l’image et les élèves sont souvent accueilli·es en stage au sein du réseau des ancien·nes élèves.

Témoignage publié dans le guide des formations 2014.