Christine Juppé-Leblond, Inspectrice générale de l'éducation nationale Cinéma et audiovisuel

Christine Juppé-Leblond, Inspectrice générale de l’éducation nationale Cinéma et audiovisuel

Si l’on peut déchiffrer la « carte routière » des formations au cinéma et à l’audiovisuel, avec ses voies royales et ses impasses, il est en revanche plus difficile de cerner l’infinie variété des métiers perpétuellement mutants auxquels elles mènent. Cinéma, photographie, télévision, internet, radio, jeux video, multimedia sont des espaces à géométrie variable dont il est bien difficile de comprendre les ramifications. Mais ces espaces existent et sont producteurs d’emploi. C’est certain. C’est encourageant. Quoi qu’il en soit, il faut d’abord et de toutes façons commencer par le commencement « pédagogique » : voir, faire, comprendre l’art des images et des sons.

Outre les différents dispositifs de sensibilisation (Ecole, Collège, Lycéens au cinéma), le lycée propose, de la seconde à la terminale, un programme très riche d’enseignements à la fois théoriques et pratiques, qui abordent tous les genres, tous les styles et toutes les époques. Il débute par une sorte de « tronc commun » en seconde et se termine par une épreuve optionnelle « lourde » ou « légère » au baccalauréat. Cette première étape de formation donne des bases solides de culture, d’analyse et de réalisation, très appréciées à l’université et dans les écoles d’art et les enquêtes indiquent que plus de 60% des élèves sensibilisés au cinéma et à l’audiovisuel au lycée travailleront dans les métiers de l’image et du son, ce qui n’est pas si mal et invite à espérer.

Après le bac, plusieurs pistes possibles. Piste d’excellence, les classes préparatoires aux grandes écoles avec option « études cinématographiques », permettent de préparer à la fois les concours des écoles normales supérieures et les concours des écoles de cinéma (Fémis, Louis Lumière, INSAS, écoles privées reconnues par l’état). Ces préparations en deux ans peuvent ouvrir bien des portes au-delà même de celles des « métiers » liés au cinéma. Elles laissent le temps de réfléchir et bien des étudiants bifurquent en ayant acquis un bagage intellectuel et culturel qu’ils n’auront jamais à regretter.

Autre piste menant plus rapidement et très efficacement à des métiers : les « BTS audiovisuel » ou « BTS communication visuelle » et leurs différentes options. Ces formations qualifiantes en deux ans sont recherchées par le marché mais difficiles d’accès pour les élèves littéraires. A noter cependant qu’il existe aujourd’hui des classes de mise à niveau cinéma-audiovisuel, ouvertes à tous les bacs, qui permettent de préparer les BTS en un an. Ces classes sont encore peu nombreuses mais sont appelées à se développer. Les BTS sont souvent la première étape d’une formation plus longue et plus ciblée qui passe par des écoles aussi diverses et prestigieuses que Supinfocom, Les Gobelins ou La Poudrière.

Les pistes généralistes universitaires sont nombreuses, mouvantes, très différentes les unes des autres et il est prudent de se rendre sur les sites des universités concernées. Ces filières mènent à des diplômes supérieurs de bon niveau mais peu professionnalisants, même si les universités sont de plus en plus nombreuses à proposer des licences et des masters professionnels.

Il n’est pas rare non plus que les élèves « en désir de cinéma » passent par d’autres chemins : tel fera Sciences Po et se spécialisera en droit de l’image, tel autre fera une école d’ingénieur pour monter sa boite de jeux video…

Pas simple donc, mais pas si compliqué non plus. Et si la révolution technologique en marche brouille parfois un peu les pistes, il n’en reste pas moins que les concepteurs, producteurs et la diffuseurs d’images doivent être solidement cultivés et impérativement conscients de leur immense pouvoir. Que leur formation soit longue ou courte, généraliste ou professionnelle elle est d’une modernité grave. Comme l’écrit Le Clezio, « Il faut se résoudre à une nouvelle morale. Camera au poing, les cinéastes ont inventé une responsabilité que nul autre moyen de communication n’avait porté avant eux » (Ballaciner, 2007).

(Témoignage publié dans l’édition 2010 du Guide des Formations)